En comparant les émissions de particules des pot d’échappement à celles générées par l’usure des pneus, les secondes sont environ 1 850 fois plus élevées que les premières…
Question orale de M. Marc Loewenstein, Député bruxellois DéFI, à M. Alain MARON, Ministre, chargé de la Transition climatique, de l’Environnement, de l’Energie et de la Démocratie participative.
Concerne : La pollution générée par les particules fines provenant de l’usure des pneus
Monsieur le Ministre,
Dans son bulletin d’information du 29 janvier 2020, la société “Emissions Analytics” posait un constat interpellant au sujet des émissions polluantes des véhicules : la plus grande source d’émissions polluantes des véhicules neufs provient désormais d’autres sources que le pot d’échappement, à savoir l’usure des freins et des pneus. Cette pollution contribue à la pollution de l’air par des particules plus fines ainsi qu’à la pollution marine microplastique. Selon ce bulletin d’information, les émissions autres que les émissions de gaz d’échappement constitueraient la source majoritaire de particules fines (PM2,5 et PM 10) provenant du transport routier.
Cette étude a fait du bruit. La société “Emission Analytics” a donc réalisé une étude complémentaire dont les résultats ont été publiés il y a quelques mois. Dans cette nouvelle étude, “Emissions Analytics” a testé et analysé plus en détail les émissions d’usure des pneus dans un plus large éventail de conditions de conduite (normale, agressive), et a effectué une analyse chimique détaillée de centaines de pneus neufs. Elle a également travaillé avec le “National Physical Laboratory” du Royaume-Uni pour quantifier objectivement les incertitudes dans ses mesures de composition chimique. Bref, la lecture de cet article respire une volonté d’objectivité et de transparence.
Je ne suis pas un scientifique et la matière est très complexe, mais je lis relativement bien l’anglais et cette nouvelle étude dégage deux tendances fondamentales : les émissions de particules d’échappement sont beaucoup plus faibles sur les voitures neuves, et les émissions d’usure des pneus augmentent avec la masse du véhicule et l’agressivité du style de conduite. Et une conclusion sans appel : “(En) comparant les émissions massiques de particules du tuyau d’échappement dans le monde réel aux émissions d’usure des pneus, toutes deux en conduite «normale», ces dernières sont en fait environ 1 850 fois plus élevées que les premières. En conduite normale, le rapport est presque le double du chiffre précédent pour une conduite agressive.”
L’étude souligne en outre la question de la toxicité de ces particules de pneus en mentionnant “des centaines de composés différents dans chaque pneu, avec une proportion importante d’aromatiques, dont certains sont des cancérigènes reconnus”. Elle souligne aussi que “les pneus varient non seulement de manière significative en termes de taux d’usure, mais également en termes de composition chimique et de toxicité. Cela indique potentiellement un moyen efficace de réduire l’usure et la toxicité grâce à des incitations économiques et à la réglementation”.
Les automobilistes sont appelés à se tourner de plus en plus vers des véhicules électriques, plus lourds et parfois peu aérodynamiques. À partir de 2035, la vente de véhicules neufs qui ne seront pas “zéro émission” sera interdite dans l’UE. J’aimerais faire le point avec vous sur cette nouvelle forme de pollution et les mesures prises pour lutter contre celle-ci. Il faut également préciser ici que cette pollution n’est pas encadrée et qu’elle semble peu surveillée.
Enfin, les décisions que nous prenons se doivent d’être cohérentes. Si l’on ne tient compte que de la circulation des véhicules, le passage à l’électrique à un sens environnemental, en Belgique, dans la mesure où, même s’il ne solutionne pas la congestion, nous n’aurons plus de problèmes liés aux pots d’échappement. Par contre, si l’on persiste dans cette direction du « tout à l’électrique » sans régler la pollution des pneus dont les conclusions exposées sont interpellantes, nos mesures d’amélioration de la qualité de l’air perdraient clairement en cohérence.
Mes questions seront les suivantes :
- Une étude récente sur la question de la pollution générée par le freinage, le type de conduite, et l’influence du poids des nouveaux véhicules électriques sur leurs pneus, mais aussi sur la toxicité des pneus, existe-t-elle en Région bruxelloise ? Dans l’affirmative, quelles en sont les conclusions ?
- Des contacts ont-ils été établis par vos cabinets et vos administrations avec le secteur des fabricants automobiles et de pneumatiques pour se saisir de cette problématique ?
- Une réglementation (régionale, fédérale, européenne) visant à encadrer les normes de pollution admises pour les pneus est-elle étudiée ? Le cas échéant, une concertation avec les autres régions et l’État fédéral est-elle prévue ou en cours sur cette thématique ?
Je vous remercie pour vos réponses.
Marc LOEWENSTEIN
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