Reconnaissance d’un Etat palestinien

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Lors de la discussion sur la proposition de résolution relative à la reconnaissance d’un Etat palestinien, je suis intervenu pour justifier en émettant des réserves sur la compétence du Parlement bruxellois sur cette question, sur l’absence de prise en compte non seulement de la résolution 181 de l’ONU, mais aussi du danger du Hamas, et, enfin, l’imposition des frontières.

Intervention dans le cadre de la discussion de la proposition de résolution sur la reconnaissance d’un Etat palestinien

Monsieur le Président, Chers Collègues,

Avant de justifier ma position sur ce texte, je tiens à préciser que, comme les auteurs de la proposition, je suis favorable à la reconnaissance d’un Etat palestinien.

Seulement, je ne peux adhérer à ce texte, tant sur la forme que sur le fond.

Comme vous l’avez constaté, je me suis abstenu hier matin, lors du vote sur la prise en considération en urgence des 2 textes déposés. Pourquoi ? Parce que je considère que ce débat n’a pas sa place au sein du Parlement bruxellois, et ce, d’autant plus que des textes sont déposés par les mêmes partis au niveau Fédéral et que le débat doit s’y tenir.

Pourquoi déposer des textes au Parlement régional Bruxellois alors qu’il s’agit d’un dossier qui relève des affaires étrangères ?

Pourquoi dépenser ICI, À BRUXELLES, autant d’énergie pour traiter d’un sujet pour lequel nous ne sommes pas compétents alors que nous avons tant de défis à relever, dont notamment ceux de la cohésion sociale et de l’interculturalité.

Voilà des questions qui m’interpellent.

J’en viens maintenant au fond de la question et je transforme ici mon « je » en « nous » puisque j’interviendrai, en mon nom, et en celui de ma collègue Joëlle Maison, qui s’est par ailleurs exprimée en commission.

Si nous sommes favorables à la reconnaissance d’un Etat palestinien, nous sommes néanmoins opposés une reconnaissance sans prise en compte de certains éléments pourtant préoccupants :

  • Le droit international :

Si on s’en réfère au droit international, comme c’est avancé dans bon nombre d’interventions, il faut alors faire référence à TOUT le droit international.

Pourquoi la proposition en discussion ne fait-elle pas référence à la résolution 181, votée le 29 novembre 1947 par l’Assemblée générale des Nations-Unies, résolution qui prévoie un plan de partage de la Palestine en deux Etats indépendants, un Etat juif et un Etat arabe ?

S’il est nécessaire de le préciser et pour éviter toute ambiguïté sur les positions des uns et des autres, nous rappelons que, quand on parle d’Etat juif, nous nous référons bien à la ratio legis de la résolution de 1947. Elle n’a rien à voir avec le projet de loi qui a fait tomber le gouvernement israélien la semaine dernière.

Nous regrettons que cette résolution n’intègre pas cette référence importante.

  • Les frontières :

Pourquoi devrions-nous, nous, Bruxellois, imposer que l’Etat de Palestine soit reconnu dans les frontières de 1967 ?

Certes, cette référence se retrouve dans des résolutions des Nations-Unies mais cette question est l’un des points centraux de la négociation qui doit être menée entre Israéliens et Palestiniens, avec éventuellement une aide internationale, mais pas par nous !

Dans cette même logique, si on souhaite aborder la délimitation des frontières, pourquoi alors ne pas aussi traiter directement de la question des réfugiés ou du statut de Jérusalem…

C’est ni le rôle de Bruxelles, ni celui de la Belgique.

Quand nous lisons Elie Barnavi ou l’appel des quelques 980 personnalités israéliennes auxquels certains ont fait référence hier et aujourd’hui, ils précisent bien que :
– d’une part, « ce qu’on peut négocier, ce sont les frontières de l’Etat palestinien, pas son droit à l’existence »
– et, d’autre part, « les chances de survie d’Israël ainsi que sa sécurité dépendent de la création d’un État de Palestine SUR LA BASE des frontières de 1967 ainsi que de la reconnaissance de la Palestine par Israël ET d’Israël par la Palestine ».

On parle donc bien d’une base de négociation et pas de frontières figées telles que définies par la proposition de résolution en discussion.

  • Le Hamas :

Un troisième point nous pose un réel problème dans ce texte, c’est l’absence de référence au danger du Hamas qu’on ne peut pas nier. On y trouve à peine qu’une petite référence aux attentats terroristes et pas un mot sur le Hamas. Pourquoi ?

Ce Hamas, qui a la mainmise sur Gaza, n’est rien d’autre que la branche palestinienne des Frères musulmans, il est repris sur la liste des organisations terroristes et, c’est important, il prévoit dans sa charte un État islamique sur les territoires de l’ancienne Palestine, l’annihilation d’Israël et le refus de toute négociation.

Est-ce que c’est avec LUI que les Etats qui souhaitent reconnaître un Etat palestinien veulent avoir à faire ?

Reconnaitre aujourd’hui, l’Etat de Palestine sans tenir compte de cette donnée, en fermant les yeux sur cette réalité, alors que d’un autre côté la Belgique envoie des F-16 pour lutter contre l’Etat islamique pose question.

Pour négocier la paix, souhait de chacun ici, il faut être deux.

Nous n’avons aucun doute sur la volonté des auteurs de la présente résolution à œuvrer en faveur de la paix. Nous sommes convaincus que votre volonté est de poser cet acte pour renforcer Mahmoud Abbas et le Fatah, mais nous craignons que les effets escomptés ne soient pas à la hauteur de vos espérances, de nos espérances.

Même si notre vote ne pèsera pas très lourd aujourd’hui dans cette assemblée, il exprime celui de deux élus qui, au-delà de leur histoire personnelle, de leur culture ou de leur religion, sont conscients de l’immense complexité de ce conflit, deux élus qui souhaitent voir Israéliens et Palestiniens vivre côte à côte, en paix et en sécurité, dans des frontières reconnues par les deux parties et dont l’EXISTENCE et la LÉGITIMITÉ seront RÉCIPROQUEMENT RECONNUS.

Comme précisé dès l’entame de mon intervention, et j’en finirai par là, nous, Joëlle Maison et moi-même, sommes favorables à la reconnaissance d’un Etat palestinien mais, compte tenu des réserves que je viens de développer, nous nous abstiendrons.

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