L’accessibilité des voiries et transports en commun bruxellois aux personnes à mobilité réduite

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Quand l’on sait que les personnes à mobilité réduite au sens large – personnes en chaise roulante, personnes âgées, parents conduisant une poussette, malvoyants, malentendants, déficients intellectuels… – constituent 35% de la population, et que l’on sera tous à l’un ou l’autre moment de notre vie une PMR, on ne peut plus se permettre de laisser l’accessibilité au rang des slogans, elle doit être une réalité concrète.

Une personne en situation de handicap, c’est d’abord une personne. Le handicap, il est handicapant parce que la marche du trottoir est trop haute, parce que l’administration communale ou le magasin est inaccessible, parce que le quai de la gare ou le métro sont mal conçus, parce qu’une information n’est pas accessible sur un site internet.

Si la planification des travaux existe, s’il y a une concertation effective avec le secteur, il reste encore du chemin avant d’offrir une Région accessible et inclusive pour tous, une Région où chaque Bruxellois, chaque usager puisse profiter d’une vie sociale, professionnelle et culturelle en toute autonomie.

Interpellation de M. Marc LOEWENSTEIN, Député bruxellois DéFI, à Mme Elke VAN DEN BRANDT, Ministre, chargée des Travaux publics, de la Mobilité et de la Sécurité routière.

Concerne : L’accessibilité des voiries et transports en commun bruxellois aux personnes à mobilité réduite

Lorsque l’on parle de mobilité, il faut penser à tous les usagers : automobilistes, usagers des transports publics, motards, cyclistes, piétons, mais également aux personnes à mobilité réduite.

Quand on sait que les personnes à mobilité réduite au sens large personnes –en chaise roulante, personnes âgées, mamans (ou papas) conduisant une poussette, malvoyants, malentendants, déficients intellectuels…– constituent 35% de la population, on ne peut plus se permettre de laisser l’accessibilité au rang des slogans, elle doit être une réalité concrète.

Une personne en situation de handicap, c’est d’abord une personne. Le handicap, il est handicapant parce que la marche du trottoir est trop haute, parce que l’administration communale ou le magasin est inaccessible, parce que le quai de la gare ou le métro sont mal conçus, parce qu’une information n’est pas accessible sur un site internet. Un chiffre interpellant : aujourd’hui, 4% seulement du réseau de la SNCB est accessible aux PMR, c’est inacceptable.

Au niveau des transports publics bruxellois, si la dynamique est en marche, des investissements dans les infrastructures sont consentis et la concertation avec le secteur a été renforcée, force est de constater que la situation n’est pas du tout optimale, que les personnes à mobilité réduite sont souvent encore confrontées à un chainon manquant dans la chaine de l’accessibilité, chainon qui empêchera l’usager de poursuivre son trajet et le fera réfléchir à deux fois avant de sortir de chez lui.

Tout comme l’aspect sécurité ou encore l’avis pompiers conditionnent toute une série de décisions dans la gestion publique, il devrait en être de même de l’accessibilité tant elle est essentielle pour garantir l’autonomie de chaque citoyen.

S’il faut bien sûr défendre une approche transversale de l’accessibilité, qu’elle concerne les infrastructures, les bâtiments, la communication mais aussi les services, je m’attarderai ici sur la question de la mobilité, des transports en commun de la STIB et des voiries.

Le 8 juillet 2016, notre Parlement a voté une résolution relative à « l’accessibilité des infrastructures et des équipements de la STIB aux personnes en situation de handicap ». Elle faisait suite à une mise en situation des membres de la commission organisée par le CAWaB, Collectif Accessibilité Wallonie Bruxelles, avec le concours de la STIB. Mise en situation qui a permis aux députés de prendre conscience de la réalité vécue au quotidien par de nombreux Bruxellois et visiteurs qui ne disposent pas de toutes leurs capacités, physiques ou mentales, pour se déplacer en toute autonomie. Et cette expérience, je vous propose d’ailleurs de la réitérer. Le CAWaB est partant pour la réorganiser vers la fin du premier trimestre 2020. Ce sera une belle occasion pour les nouveaux députés, mais également pour les anciens qui n’ont pas vécu l’expérience, de prendre mieux la mesure des réalités vécues au quotidien par les PMR.

Il est bien évident que l’on ne peut pas rendre le réseau de la STIB accessible, totalement, aux personnes à mobilité réduite de jour au lendemain et que certaines demandes de la résolution nécessitent une planification importante, la mobilisation de moyens financiers conséquents et des délais d’exécution plus longs pour être concrétisées. Et il en est de même pour les voiries, qu’elles soient communales ou régionales.

Nous ne pouvons aujourd’hui que constater et regretter que les infrastructures aient été conçues initialement sans se soucier des PMR. Elles ont été conçues pour des personnes actives et en forme devant rejoindre leur lieu de travail. Une partie de la population a été alors oubliée. Même si les moyens peuvent être plus importants, les adaptations ou transformations doivent se faire de manière progressive. Et le point positif par rapport au passé est que le secteur, via le CAWaB notamment, est davantage partie prenante que par le passé via le comité de pilotage « accessibilité » créé au sein de la Région et auquel participe aujourd’hui Bruxelles Mobilité, la STIB, la DITP, le cabinet du ministre de la mobilité, et auquel il serait utile d’associer Bruxelles Urbanisme et Patrimoine.

Pour en revenir à la résolution, l’évaluation régulière fut l’une des demandes de notre Parlement. Faire le point sur la question en début de législature est une belle opportunité pour prendre le dossier à bras le corps, suivre son évolution et espérer être fiers des résultats enregistrés dans les 5 années à venir.

Au travers de cette interpellation, j’aimerais qu’on puisse déjà faire l’évaluation des demandes de la résolution suivantes :

  • améliorer le service d’assistance dans le métro en faisant correspondre la disponibilité de l’assistance aux personnes à mobilité réduite à l’horaire d’ouverture du métro ;
  • réviser le processus de vérification du matériel roulant, afin d’accorder une attention effective au bon fonctionnement des équipements d’accessibilité (rampes, boutons d’appel…) ;
  • améliorer les informations utiles à destination des personnes à mobilité réduite par une actualisation du site internet et de l’application mobile de la STIB, par le relais des informations d’urgence par écrit pour les personnes présentant une déficience auditive, par le positionnement de la signalétique, et par la formation et la sensibilisation du personnel des Bootik ;
  • diffuser une information correcte, fiable et mise à jour en temps réel, notamment pour ce qui concerne les accès de chaque station et la disponibilité des ascenseurs, via le site internet de la STIB, l’application mobile ainsi que via une signalétique aux accès de chaque station, afin de diriger une personne à mobilité réduite vers une entrée accessible ;
  • prévoir une signalétique plus lisible afin de permettre aux personnes à mobilité réduite d’accéder plus facilement à leur moyen de transport ;
  • et, enfin, adapter la signalétique pour les personnes intellectuellement déficientes, qui peuvent être totalement désorientées dans une station de métro ou dans l’espace public. Il était notamment demandé pour elles,
    • un marquage de lignes au sol,
    • la transformation des lettres en pictogrammes représentant le métro, le tram ou le bus, voir le train,
    • ou encore l’adaptation de l’ergonomie des bornes d’achat.

Le nouveau contrat de gestion de la STIB 2019-2023 va dans le bon sens. En plus de sa mission de base, la STIB s’est définie 5 grandes priorités : l’accessibilité, l’environnement, le bien-être de ses collaborateurs, la contribution à la cohésion sociale et la sécurité. Son article 25 traite de l’accessibilité et est rédigé comme suit :

« L’offre pour personnes à mobilité réduite est composée à la fois d’une série d’initiatives visant à améliorer l’accessibilité des services réguliers (en ce compris l’information sur l’accessibilité de ceux-ci et l’assistance aux voyageurs) et d’un service spécialisé de transport à la demande pour personnes handicapées.

Les Parties s’engagent à poursuivre, dans les priorités et limites budgétaires fixées par la Région, la mise en accessibilité universelle du réseau en exécution du Plan stratégique de mise en accessibilité du réseau de transport public de la STIB.

La STIB s’engage en outre dans une approche de « design universel » veillant à ce que l’accessibilité aux PMR soit systématiquement prise en considération lors de la conception et de l’évaluation qualitative de tous ses produits et services ».

Nous parlons ici principalement de la STIB, mais avant d’accéder à une station de tram, à un arrêt de bus, avant de monter dans un bus, un tram, un métro, ou encore acheter son ticket à une borne, il faut sortir de chez soi, cheminer les trottoirs, traverser les voiries et contourner les chantiers, sans aborder ici la question des trottinettes…

Des outils et aides sont déjà aujourd’hui proposés par Bruxelles Mobilité à l’attention des communes pour accroitre l’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Je pense aux formations de conseiller en accessibilité à l’attention des agents communaux, au recours à un bureau d’études spécialisé en accessibilité ou encore à des subventions PAVE (plan d’accessibilité des voiries et de l’espace public).

Seulement, au vu de la réponse à une question écrite (n°1) de cette législature sur le sujet, il apparaît que seules deux communes en ont bénéficiées, à savoir Schaerbeek (364.670€ en 2017 et 300.000 en 2018) ainsi que Saint-Josse (15.509,27€ en 2017). Quant à 2019, des demandes de subvention ont été introduites par Bruxelles-Ville, Ixelles et Molenbeek.

A côté et préalablement à ces subventions, des diagnostics PAVE sont réalisés dans les 19 communes, ils visent à définir un réseau piéton structurant, en collaboration avec les communes, et à relever l’ensemble des non-conformités –par rapport à l’accessibilité PMR sur la base du référentiel « cahier de l’accessibilité piétonne »– sur l’ensemble des voiries bruxelloises.

Quant à notre déclaration de politique régionale, elle aborde l’accessibilité sous différents angles en ces termes :

  • « L’accessibilité aux personnes à mobilité réduite au réseau de transport en commun et l’amélioration du confort général sera un point essentiel de la politique d’investissement de la STIB (ascenseurs, sanitaires, assistance, signalétique et communication, etc.) ».
  • « Dans la mise en œuvre du PRM et afin de favoriser la mobilité des piétons et personnes à mobilité réduite, la Région établira un plan opérationnel spécifique pour les piétons qui intégrera la mise en œuvre progressive et coordonnée de son plan d’accessibilité des voiries, en partenariat avec les communes et associations représentatives. »
  • Ou encore que « le Gouvernement proposera des aménagements qualitatifs de l’espace public, en tenant compte de la dimension genrée et de l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (PMR). Une information complète concernant le niveau d’accessibilité aux personnes en situation de handicap et autres personnes à mobilité réduite des infrastructures et lieux ouverts au public sera donnée aux utilisateurs et visiteurs ».

Compte tenu de ce qui précède, j’en viens à mes questions :

– Qu’en est-il de l’état d’avancement des demandes faites par le Parlement via la résolution adoptée le 8 juillet 2016, et plus particulièrement sur les points repris plus haut ?

– Comment la STIB s’est-elle organisée en interne pour répondre à ce défi de l’accessibilité. Selon mes informations, il y a une personne en charge de l’accessibilité. Est-il prévu de renforcer ce service, notamment au niveau technique ? Si la concertation se fait en amont, quid du suivi des chantiers pour vérifier que les recommandations émises soient bien exécutées ?

– Qu’en est-il de l’exécution par le Gouvernement de son plan opérationnel spécifique pour les piétons intégrant la mise en œuvre de son plan d’accessibilité des voiries, en partenariat avec les communes et associations représentatives ?

– Quid des moyens développés pour offrir une information complète concernant le niveau d’accessibilité des PMR aux infrastructures et lieux ouverts au public ?

– Quels sont les moyens mis en œuvre pour former et sensibiliser l’ensemble du personnel à l’accueil de personnes à mobilité réduite et à l’accessibilité (de la direction au personnel de terrain en passant par les responsables d’achat de matériel, les concepteurs et les constructeurs d’arrêts) ?

Marc LOEWENSTEIN


Pour découvrir le compte rendu des débats, cliquez ici et choisissez la Commission Mobilité du 10/12/2019. Il est disponible quelques jours après la date du débat.

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